Retour sur le week-end des séminaristes à Paris – 2&3 décembre 2023

Pour la première fois depuis 2014, les séminaristes de France sont réunis pour 3 jours de rassemblement. 600 séminaristes : quelle espérance !

600 séminaristes de France : quelle espérance !

Quel rassemblement ! Ils viennent de 25 lieux de formation répartis sur le territoire (avec 100 formateurs), ils remplissent les Eglises et les rues de Paris et témoignent de leur joie. Ce qui frappe, c’est leur diversité et la fraternité qui les unit.

L’occasion pour Mgr de Moulins-Beaufort de leur partager son témoignage personnel sur l’amour de l’eucharistie, le sentiment d’être protégé par la grâce, un amour croissant de Jésus. Il a également répondu à certaines questions de façon claires.

Voici quelques notes prises à la volée :

1/ Sur la formation au séminaire :

3 éléments essentiels pour grandir en humanité :

      1. Il est indispensable de pouvoir vivre avec les moyens pauvres de la présence de Dieu : La prière, les sacrements, la vie fraternelle. Le séminaire nous aide à vivre la joie de l’Evangile avec « des moyens pauvres » (sans choses fantastiques). Notre quotidien peut être austère. Le quotidien de la vie d’un prêtre peut l’être. C’est là qu’il découvre Dieu.
      2. Second aspect : la vie intellectuelle. Les années au séminaire nous permettent d’entrer dans l’intelligence de la foi. On doit chercher à comprendre le monde, et les personnes. La vie intellectuelle développe en nous une intelligence de l’histoire du salut.
      3. Troisième aspect: la charité fraternelle. La charité entre nous est le garant de la charité pastorale. On n’est jamais prêtre tout seuls.

Le séminaire est un lieu où l’on travaille nos capacités amicales et affectives.

Un point sur l’intégration de la sexualité . C’est un joyeux combat qui nous accompagne toute notre vie. A 20 ans, à 40 ans, à 60 ans. Apprendre à intégrer la sexualité est un vrai travail, sérieux. Grandir dans la chasteté, à l’école du Christ, demande un sacrifice : sacrificie posé une fois pour toutes au moment du choix mais aussi à reposer chaque jour. C’est un don. On apprend chaque jour la chasteté des relations, en affinant aussi la qualité de nos relations avec les femmes.

2/ On est moins de prêtres ?

Oui ! Et un tout petit nombre dans 20 ans. On passe d’une époque de la pastorale de l’encadrement à une époque de la pastorale de l’accompagnement. Dieu nous donne de vivre autre chose que ce que nous avons vécu. L’histoire de l’Eglise et de l’évangélisation nous invite à ne pas nous effrayer et à inventer de nouveaux modèles. Il y a beaucoup de plasticité dans l’Eglise. Mais l’église ne peut vivre sans l’eucharistie. Avant de monter au ciel, Jésus n’a pas fait la carte des diocèses et des paroisses. N’ayons pas peur de la nouveauté.

Pour avoir des prêtres, il faut les demander au Seigneur, il faut accueillir ceux qu’il nous donne, il faut aussi désirer en avoir dans nos familles !

3/ Les traditionnalistes.

A la question d’un séminariste : « l’Eglise de France a-t-elle un problème avec les traditionnalistes », Mgr de Moulins-Beaufort répond sans détour : oui.

Oui, sans doute en raison de notre histoire mouvementée depuis la Révolution. S’il y a une question centrale, c’est une question de théologie politique et de rapport au monde. Le décret de Vatican II sur la liberté religieuse est très clair. Le Christ n’est pas venu bâtir des nations catholiques mais il est venu fonder l’Eglise. Ce n’est pas la même chose. A force de trainer la nostalgie d’un état catholique, on perd notre énergie pour l’évangélisation.

4/ les prêtres et la synodalité ?

Être prêtre c’est être capable d’entendre et de sentir le peuple de Dieu (cf. le Bon berger en Jean 10). C’est pour cela que la synodalité est notre chemin. La synodalité c’est être conscient que chaque personne dans le peuple de Dieu a aussi le sens de Dieu. La voix de chacun importe. Comme prêtre, vous êtes appelé à « sentir avec » les personnes pour les conduire vers le Christ.

5/ Les prêtres et internet

Sur la présence des clercs sur internet, Mgr de Moulins-Beaufort encourage (sans être lui-même un habitué des réseaux…) et propose 2 axes pour la prudence :

    • Ne pas tomber dans la séduction
    • Ne jamais exacerber les passions. L’Eglise est là pour travailler à l’unité et pour encourager, pour apporter la bénédiction de Dieu.

On a eu froid à Saint-Eustache mais ces paroles fortes ont fait beaucoup de bien dans les cœurs. Le temps d’intercession qui a suivi sur le Parvis de Notre-Dame pour le pays, pour la population française et les peuples du monde a été magnifique.

MERCI les séminaristes !

Mémoire de saint Charles de Foucauld – HOMELIE DE MGR LAURENT ULRICH, ARCHEVEQUE DE PARIS, Église de la Madeleine

Parvis de la cathédrale Notre-Dame de Paris, 2 décembre 2023

Chers séminaristes de France, je vous souhaite la bienvenue sur ce parvis de Notre-Dame, avec vos formateurs, avec un certain nombre des évêques de France. Vous C êtes venus ici continuer votre pèlerinage entamé depuis jeudi soir, vous ouvrir encore les uns aux autres et laisser votre cœur ouvert à l’ensemble de l’Église en France et à l’ensemble de notre pays.

Nous venons ici, intrépides, sur ce parvis, même si nous ne pouvons pas pénétrer plus loin et plus avant dans la cathédrale, mais comme des millions de visiteurs, comme des millions de croyants qui sont venus ici depuis cinq ans pour voir, trouver la joie de savoir cette cathédrale en restauration. Mais aussi prier la Vierge Marie qui veille sur ce parvis, ici à ma gauche, depuis ces cinq années, la prier qu’elle soit toujours signe d’un amour qui nous dépasse et qui franchit tous les obstacles.

Bienvenue pour entendre ensemble la Parole de Dieu et chanter la joie de l’Évangile.

Nous entendons cette belle parole du prophète Sophonie. Nous chantons souvent cette joie-là. La joie de savoir que le Seigneur est en nous, la joie de savoir que le Seigneur n’abandonne jamais son peuple, la joie de savoir que le Seigneur est vivant entre nous et que nous pouvons en communiquer sans cesse la bonne nouvelle. Cette parole de consolation n’élimine évidemment pas les sources de peine, les inquiétudes que nous portons. Nous restons toujours lucides sur la situation de l’Église en France et à travers le monde, nous savons bien que le message de l’Évangile n’est pas écouté à la mesure dont nous voudrions qu’il le soit. Nous savons bien qu’il est contredit de mille et une façons par notre pauvre témoignage et aussi par les circonstances difficiles que le monde traverse sans cesse. Nous restons lucides mais le psalmiste, le prophète, le témoin du Seigneur, les maîtres spirituels à travers les temps, n’oublient jamais de nous dire que la peine et l’espérance font chemin ensemble. Nous savons toujours que la lucidité est nécessaire, que connaître les fragilités relève d’un regard ajusté sur le monde. Mais, justement, nous savons que le Seigneur n’abandonne pas ce monde et n’abandonne pas son Église sur les chemins difficiles, qu’il nourrit en chacun, et dans le peuple entier qui lui est consacré, l’espérance que la joie soit toujours la plus forte. Nous savons que la joie du Seigneur habite en nous, que la joie du Seigneur est notre rempart. Vous savez, vous séminaristes qui vous préparez à un ministère dans l’Église, au ministère de prêtre dans l’Église ; vous savez, vous chrétiens qui êtes ici, qui désirez servir le Seigneur et l’Évangile ; nous savons nous, évêques, combien la joie domine dans l’annonce de l’Évangile. Vous savez vous, formateurs, que vous pouvez continuer d’assurer ce service de la formation des plus jeunes pour qu’ils entrent dans le ministère avec à la fois le regard lucide et le cœur rempli de la joie que donne le Seigneur.

Devant cette cathédrale qui a été tellement blessée, il y a cinq ans, nous nous souvenons à la fois de la peine qui a étreint le monde entier, de voir cette cathédrale en tel danger et comme dans une fragilité existentielle. Mais nous savons aussi que, sur les bords de la Seine

cette joie-là habite notre cœur à nous qui pouvons constater cela. Cette joie nous savons qu’elle ne vient pas simplement d’un succès d’estime et d’une belle compétence de tous ceux qui ont ici travaillé, mais elle vient du cœur qui est habité par le Seigneur. La joie du Seigneur est notre rempart. « Heureux les hommes, Seigneur, dont tu es la force, des chemins s’ouvrent dans leur cœur. » (Ps 83)

Que pour nous cette parole résonne ce matin. Que nous puissions chanter la joie de l’espérance et prier pour notre Église en France. Prier pour tous ceux que le témoignage de notre Église peut toucher. Prier pour tous ceux qui souffrent. Prier pour un pays qui vit et traverse des épreuves comme toujours, mais qui ne désespérera pas, et en tout cas un pays pour lequel nous prions avec une immense espérance et une grande joie. Elle nous vient du Seigneur, gardez-la dans le cœur.

MESSAGE DU PAPE FRANÇOIS

Message du Pape François pour cette occasion, avec des mots forts et encourageants, notamment sur le célibat ecclésiastique.

 

MESSAGE DU PAPE FRANÇOIS

SIGNÉ PAR LE CARDINAL SECRÉTAIRE D’ÉTAT, PIETRO PAROLIN,

AUX SÉMINARISTES DE FRANCE

Je suis heureux, chers séminaristes de France, de pouvoir m’adresser à vous à l’occasion de votre rencontre, et de vous transmettre les chaleureuses pensées que Sa Sainteté le Pape François forme pour chacun d’entre vous dans la prière. Il rend grâce pour l’appel singulier que le Seigneur vous a adressé, vous ayant choisis parmi tant d’autres, aimés d’un amour privilégié et mis à part ; et il rend grâce aussi pour la réponse courageuse que vous souhaitez donner à cet appel. C’est en effet un motif d’action de grâce, d’espérance et de joie que de constater que nombre de jeunes – et de moins jeunes – osent encore, avec la générosité et l’audace de la foi, et malgré les temps difficiles que traversent nos Églises et nos sociétés occidentales sécularisées, s’engager à la suite du Seigneur pour son service et celui de leurs frères et sœurs.

C’est pourquoi je vous dis : merci ! Merci de donner de la joie et de l’espérance à l’Église de France qui vous attend et qui a besoin de vous. Et elle a besoin de vous pour que vous soyez ce que le prêtre doit être, ce qu’il a toujours été et ce qu’il sera toujours de par la volonté divine : « Participer à l’autorité par laquelle le Christ édifie, sanctifie et gouverne son Corps » (Presbyterium ordinis, n. 2) ; et cela par une configuration ineffable au Christ, Tête de son Église, qui le met en vis-à-vis du Peuple de Dieu – bien qu’il en fasse toujours partie – pour l’enseigner avec autorité, le guider avec sécurité et lui transmettre efficacement la grâce par la célébration des sacrements (cf. Ibid. n. 4,5,6). Au plus haut point, source et sommet de la vie de l’Église et de sa vie personnelle, le prêtre célèbre la messe où, rendant présent le sacrifice du Christ, il s’offre en union avec Lui sur l’autel et y dépose l’offrande du Peuple de Dieu tout entier et de chacun des fidèles.

Je vous invite, chers séminaristes, à bien enraciner en vos âmes ces vérités fondamentales qui seront à la base de votre vie et de votre identité même. Et au cœur de cette identité, configurée au Seigneur Jésus, se trouve le célibat. Le prêtre est célibataire – et il veut l’être – parce que Jésus l’était, tout simplement. L’exigence du célibat n’est pas d’abord théologique, mais mystique : comprenne qui pourra ! (cf. Mt 19, 12). On entend beaucoup de choses sur les prêtres aujourd’hui, la figure sacerdotale est bien souvent déformée dans certains milieux, relativisée, parfois considérée comme subalterne. Ne vous en effrayez pas trop : personne n’a le pouvoir de changer la nature du sacerdoce et personne ne la changera jamais, même si les modalités de son exercice doivent nécessairement prendre en compte les évolutions de la société actuelle et la condition de grave crise vocationnelle que nous connaissons.

Et l’une de ces évolutions sociétales, relativement nouvelle en France, est que l’institution ecclésiale, et avec elle la figure du prêtre, n’est plus reconnue ; elle a perdu au yeux du plus grand nombre tout prestige, toute autorité naturelle, et se trouve même malheureusement salie. Il ne faut donc plus compter dessus pour trouver audience auprès des personnes que nous rencontrons. C’est pourquoi la seule manière possible de procéder à la nouvelle évangélisation demandée par le Pape François, afin que chacun fasse une rencontre personnelle avec le Christ (cf. Evangelii Gaudium, Introduction, III), est l’adoption d’un style pastoral de proximité, de compassion, d’humilité, de gratuité, de patience, de douceur, de don radical de soi aux autres, de simplicité et de pauvreté. Un prêtre qui connaisse l’« odeur de ses brebis » (Messe chrismale, 28 mars 2013) et qui marche avec elles, à leur rythme. C’est de cette manière que le prêtre touchera le cœur de ses fidèles, gagnera leur confiance et leur fera rencontrer le Christ. Cela n’est pas nouveau, bien entendu ; d’innombrables saints prêtres ont adopté ce style dans le passé, mais il est devenu aujourd’hui une nécessité sous peine de ne pas être crédible ni entendu.

Afin de vivre cette exigeante, et parfois rude, perfection sacerdotale, et faire face aux défis et aux tentations que vous rencontrerez sur votre route, il n’y a, chers séminaristes, qu’une solution : nourrir une relation personnelle, forte, vivante et authentique avec Jésus. Aimez Jésus plus que tout, que son amour vous suffise, et vous sortirez victorieux de toutes les crises, de toutes les difficultés. Car si Jésus me suffit je n’ai pas besoin de grandes consolations dans le ministère, ni de grands succès pastoraux, ni de me sentir au centre de réseaux relationnels étendus ; si Jésus me suffit je n’ai pas besoin d’affections désordonnées, ni de notoriété, ni d’avoir de grandes responsabilités, ni de faire carrière, ni de briller aux yeux du monde, ni d’être meilleur que les autres ; si Jésus me suffit je n’ai pas besoin de grands biens matériels, ni de jouir des séductions du monde, ni de sécurités pour mon avenir. Si au contraire je succombe à l’une de ces tentations ou faiblesses, c’est que Jésus ne me suffit pas et que je manque à l’amour.

Alors, chers séminaristes, « Dieu est fidèle, il vous a appelés à vivre en communion avec son Fils, Jésus-Christ notre Seigneur » (1 Co 1, 3-9). Ayez toujours comme premier souci de répondre à cet appel, et de fortifier votre union avec Celui qui daigne faire de vous son ami (cf. Jn 15, 15). Il est fidèle et fera toute votre joie. Et je ne peux que vous recommander, comme maîtresse de vie spirituelle, Sainte Thérèse de l’Enfant Jésus et de la Sainte Face, en ce 150ème anniversaire de sa naissance, Docteur en scientia amoris dont vous avez le privilège de pouvoir lire l’admirable doctrine dans sa langue d’origine. Elle qui “respira” sans cesse le Nom de Jésus, son “seul amour” (cf. C’est la confiance, elle vous guidera sur la voie de la confiance qui vous soutiendra chaque jour et vous fera tenir debout sous le regard du Seigneur lorsqu’Il vous appellera à Lui (cf. Ibid, n. 3).

Le Pape François vous confie à son intercession et à la protection de Notre Dame de l’Assomption, Patronne de la France, ainsi que tous les membres de vos communautés de séminaires. Il vous accorde de grand cœur la Bénédiction Apostolique.

Cardinal Pietro Parolin

Secrétaire d’État de Sa Sainteté

Montmartre- la joie de l’appel de Dieu

Veillée de prière avec les 600 séminaristes et beaucoup de jeunes.

Les saints étaient avec nous dans cette simple et fervente prière pour que l’appel de Dieu retentisse dans les cœurs!

Nous voici entrés dans l’avent ! … dans la confiance d’un Dieu qui appelle parce qu’il aime. Voici la prière que nous tous redis après avoir renouvelés les promesses du baptême.

Dieu notre Père, à chaque génération, tu as montré ta fidélité à ton Église en envoyant des ouvriers dans ta moisson.

Par ta puissance divine tu l’as gardée par la foi.

Tu as suscité en elle de nombreux saints qui ont rendu témoignage à ton Nom et ont porté du fruit par leur vie donnée.

C’est pourquoi nous te supplions encore aujourd’hui, avec tous les saints prêtres et missionnaires qui nous ont précédés, et par l’intercession de la Bienheureuse Vierge Marie.

Accorde à l’Église qui est en France la grâce de la conversion pour qu’elle transmette fidèlement la lumière de la foi aujourd’hui.

Accorde-lui de nombreuses et saintes vocations sacerdotales pour que se construise le corps du Christ et que tous parviennent à la connaissance de la vérité.

Accorde-lui ton Esprit de force afin qu’elle brûle du désir de partager avec tous les richesses du salut éternel.

Par Jésus le Christ notre Seigneur.

Veillée d’adoration, HOMELIE DE MGR OLIVIER DE CAGNY, ÉVEQUE D’ÉVREUX

Basilique du Sacré-Cœur de Montmartre, 2 décembre 2023

Nous voici, au cœur de notre rassemblement de tous les séminaristes de France, avec nos frères et sœurs qui prient pour nous et avec nous, et que nous remercions de leur présence.

Nous voici, au milieu de notre rassemblement de tous les séminaristes de France, au cœur du Mystère de notre foi : le Christ, en personne, vrai Dieu et vrai homme, se donne à nous dans le Mystère pascal. Livré sous l’apparence de ce pauvre morceau de pain, il nous entraîne dans son amour. Il nous inclut dans son offrande au Père et au monde. Ici, sur cette colline sainte, à mi-chemin entre la ville de Paris qui représente ce soir toutes nos cités, toutes nos communautés, et le ciel où Dieu habite éternellement.
Nous voici, à la veille de ce premier dimanche de l’Avent, tout entiers livrés à l’Amour rédempteur, tout entiers tournés vers le retour du Fils de Dieu dans sa gloire, comme aimantés par le Mystère de l’incarnation.
Nous voici au Sacré-Cœur : mystère de l’union parfaite, en Jésus, de son humanité et de sa divinité. Cette union des deux natures, sans division ni séparation, sans confusion, dans l’admirable échange qui est la source de notre salut. Le Sacré-Cœur de Jésus n’est-il pas l’expression de cet Amour divin totalement donné humainement, livré sans réserve au genre humain qui l’attend ? Livré à ces foules désemparées et abattues comme des brebis qui n’ont pas de berger. La moisson est abondante. Notre faible nombre, nommé parfois « crise des vocations », ne doit pas nous faire douter de cette vérité énoncée par Jésus lui-même : « La moisson est abondante ».
Nous voici dans ou devant le cœur du Christ. Il est saisi de compassion en nous voyant et en voyant derrière nous, avec nous, autour de nous, ces foules de nos contemporains, dans nos villes et nos villages, dans nos banlieues et nos campagnes. Le Christ est là, qui nous enseigne, offre gratuitement à nos cœurs de pauvres pécheurs l’Évangile du Royaume, et guérit toute maladie et toute infirmité.
N’est-ce pas là aussi le mystère du sacerdoce auquel les séminaristes sont appelés ? « Le sacerdoce, c’est l’amour du cœur de Jésus », disait le saint curé d’Ars. Le prêtre offre à Dieu sa pauvre humanité blessée, abîmée, parfois fatigué ou déprimée, pour que l’agir divin puisse s’y déployer. « Je vis, mais ce n’est plus moi, c’est le Christ qui vit en moi ». Par mon cœur divisé, limité, imparfait, le Christ veut proclamer l’Évangile et guérir toute blessure.
Ce soir, offrons au Christ notre humanité, pour que par Lui tout être humain puisse recevoir le salut. Renouvelons notre acte de foi : oui, c’est Dieu qui agit dans l’humanité du prêtre. Cette grâce inouïe, ce mystère insondable, cette folie de l’amour divin, c’est la Sagesse de Dieu.
Dans l’adoration eucharistique, nous ne sommes pas devant un objet statique, mais devant le résultat de l’acte eucharistique de Jésus, corps livré, sang versé. Nous sommes invités à entrer de tout notre être dans ce don total de notre vie pour la gloire de Dieu et le salut du monde, dans le dynamisme très puissant de l’amour qui se répand en nous par la grâce de la communion à la prière et au corps du Christ.
Ce soir, entourés de nos frères et sœurs baptisés, forts aussi de notre propre baptême et de notre confirmation qui a inscrit en nous définitivement la puissance de l’Esprit Saint, renouvelons notre désir d’être tout entiers consacrés au Cœur de Jésus. Dieu est le maître de la moisson. Redisons-lui notre désir d’être entièrement, avec notre corps et notre âme, de tout notre cœur et de tout notre esprit, ses ouvriers.

L’encouragement paternel et spirituel du Cardinal Jean-Marc Aveline aux 600 séminaristes de France.

Avant l’eucharistie qui a réuni les 600 séminaristes, une centaine de prêtres et une trentaine d’évêques de toute la France ce matin à Saint-Sulpice, l’archevêque de Marseille s’est adressé aux séminaristes de France, comme un père bienveillant.

Voici 14 morceaux choisis de cette parole forte

(notes du P. Vincent Breynaert, relues par le Cardinal Aveline)

1/ Le BAPTÊME

La base de notre vie, c’est le BAPTÊME. C’est le socle baptismal. C’est à partir de là qu’on comprend la profondeur de notre vocation dans l’Eglise.

2/ L’AMOUR de JESUS

« Le sacerdoce, c’est l’amour du cœur de Jésus ». « Pierre, m’aimes-tu ? » La chose la plus importante dans la vie d’un prêtre c’est l’amour de Jésus. Entretenez cette amitié pour qu’elle porte du fruit. C’est une amitié toute particulière qui permet au prêtre d’entrer dans les profondeurs de l’amour de Dieu pour le monde. Un bon prêtre est un homme qui aime les gens.

3/ LA DERNIERE PLACE

C’est dans une de ces nuits d’adoration à Montmartre, comme vous hier, que Charles de Foucauld, revenu de son Nazareth, et un peu perdu, avait consenti à devenir prêtre. Et il ne le voulait pas car il sentait bien qu’être prêtre c’était avoir un statut. Mais il ne voulait pas que ce statut l’éloigne de la dernière place. N’oubliez pas la dernière place, celle du Christ, celle du pauvre. Si vous sentez que vous êtes loin des problématiques ordinaires de la vie des gens, que vous ne savez plus le prix de la baguette, n’oubliez pas la dernière place. Revenez à la place des pauvres.

4/ LA FECONDITE

N’oubliez jamais que la fécondité de votre ministère n’est pas proportionnelle au taux de remplissage de votre agenda. C’est dans la passivité du Christ que le salut du monde s’est réalisé. A la Croix, quand la violence fait taire la parole, quand les clous immobilisent l’action, c’est là pourtant que se réalise le salut du monde. La fécondité de votre ministère n’est pas proportionnelle à votre efficacité et au nombre d’activités.

5/ le SALUT des AMES

Ici à Paris, vous avez aussi mis vos pas dans ceux de Saint-Ignace, dévoré par le salut des âmes. Gardez bien la passion pour le salut des âmes. Vous connaissez la lettre que Saint François-Xavier le 15 janvier 1544 envoie à Saint-Ignace. « Des foules ici manquent de devenir chrétiennes, faute d’hommes qui se consacrent à la tâche de les instruire. Bien souvent, il me prend envie de descendre vers les universités d’Europe, spécialement celle de Paris, et de crier à pleine voix, comme un homme qui a perdu le jugement, à ceux qui ont plus de science que de désir de l’employer avec profit : « Combien d’âmes manquent la gloire du ciel et tombent en enfer à cause de votre négligence ! » et plus loin : « Quand ils étudient les belles-lettres, s’ils voulaient étudier aussi le compte que Dieu leur demandera pour le talent qu’il leur a donné ! »

6/ VOLONTE de DIEU et INCLINATIONS HUMAINES

Chers séminaristes, ne pas préférez mes propres inclinations à la volonté divine. L’histoire de la vocation, c’est la préférence à la volonté de Dieu et non pas à mes inclinations.

Et quand vous serez ordonnés, ne pensez pas que vous serez arrivés. La volonté divine restera toujours à découvrir au fur et à mesure du chemin. Ce ne sont pas nos inclinations personnelles qui sont le meilleur indice de ce que Dieu attend de nous. Non, ce sont les besoins du peuple. « Pais mes agneaux » dit Jésus et non pas : suis tes inclinations. Oui, c’est un travail difficile…

7/ La GRACE d’avoir été appelé. La JOIE plus que l’EFFROI

Comment ne pas remercier Dieu le Père pour la grâce qu’il vous fait de suivre le Christ en vous disposant à devenir prêtre, quelle grâce dans cet appel. C’est à la fois tout simple et aussi vertigineux.

Cet appel, on le reçoit dans un mélange de joie et aussi d’effroi.

  • La joie car Dieu nous fait confiance. Et on grandit quand on nous fait confiance.
  • L’effroi aussi car chacun de nous sait qu’il est un homme pêcheur. Chacun de nous peut honnêtement dire comme Pierre : « écarte-toi de moi Seigneur car je suis un homme pécheur. » Oui, L’appel se greffe sur la miséricorde et la miséricorde voit la misère (devise du pape). Chers amis :
  • N’oubliez jamais la confiance que Dieu vous fait : elle est gratuite et définitive
  • N’oubliez pas le péché : il est immense. Et la miséricorde elle est infinie.

Alors la joie l’emporte sur l’effroi. Pour marcher vers la sainteté vaut mieux une pauvreté offerte qu’une prospérité satisfaite.

Comme elle est dangereuse cette pente de la prospérité satisfaite ! La prospérité satisfaite, c’est quand l’armure ne se fend pas, que la grâce ne pénètre pas. ( cf. Charles Péguy).

8/ AIMER LE CHRIST ET AIMER L’EGLISE

Sans le Christ l’Eglise n’existerait pas bien sûr mais sans l’Eglise vous ne connaitriez pas le Christ ! Elle est son épouse et il vous la donne pour mère à l’école de la vierge Marie. Pour aimer l’Eglise, il faut aimer la Vierge Marie.

Marie a ce double regard sur l’Eglise et sur l’humanité. Le prêtre est appelé aussi à ce double regard : regarder le peuple avec les yeux de Dieu et regarder Dieu avec les yeux du peuple.

Surtout sois bon pour les autres ! aie de la bonté. Et regarde Dieu avec les yeux du peule : c’est cela l’intercession. Ne cesse pas d’intercéder pour la cause du peuple. Sois un intercesseur, c’est ce que le peuple attend du prêtre : il sait que le prêtre regarde Dieu avec les yeux du peuple et qu’il regarde le peuple avec les yeux de Dieu. Cela est la posture mariale.

9/ La VOCATION et l’EGLISE

Le christ vous appelle et c’est l’Eglise qui fait avec vous œuvre de discernement. Ayez donc confiance en l’Eglise. C’est une chose très importante. La vocation, ça ne se passe pas entre Dieu et moi. Ça se passe entre Dieu, l’Eglise et moi. Il faut bien l’Eglise pour me former, me confirmer et me donner des outils pour savoir ce à quoi il appelle.

Vous aussi n’oubliez pas la vertu de l’incardination, et ce lien avec l’évêque. Pour le prêtre le lien à l’Eveque c’est la colonne vertébrale. Pour l’évêque le lien au prêtre, c’est sa joie et son tourment.

Ayez une relation saine, franche avec votre évêque. Il se peut que cette relation se gâche. Mais quand la relation se gâche, le prêtre finit par boiter. Parfois la relation s’est atrophiée sans même que je m’en aperçoive : elle a gardé l’apparence mais elle a perdu en profondeur. Prenez soin de cette relation !

Qu’est-ce que l’évêque fait toute la journée : il encourage ! À continuer… et parfois à changer ! Donc aimez l’Eglise. Accrochez-vous au christ, c’est lui le roc. Et Aimez l’Eglise ! Quand vous la voyez avec ses tâches et ses rides, aimez-là quand même. Travaillez aussi pour qu’elle accepte que les exigences de l’Evangile la rendent sainte. Mais ce n’est que quand on aime qu’on peut travailler dans ce sens.

10/ UNE EGLISE COMPOSEE

L’Eglise est composée, et non pas uniforme. Pensez à tous ceux qui, par grâce, sont devenus chrétiens sans passer par la case du judaïsme. Soyez donc vigilants : il y a des ethnicisations discrètes qui ne reflètent plus la diversité du peuple appelé.

11/ Une EGLISE DE MARTYRS

L’Eglise est appelée à être « ecclesia semper reformanda ». Elle est aussi, toujours, l’Eglise des martyrs. Notre vocation de prêtre est fondée sur le sang du Christ et elle est soutenue par le sang des martyrs. Je ne vous dis pas : votre vocation sera facile. Mais je vous dis : ne lâchez pas la main du Christ et ne lâchez pas la main de l’Eglise. Ne regardez pas l’Eglise par la biais de l’institution (le cléricalisme est une maladie très partagée c’est la maladie du pouvoir). Mais regardez-là par le chemin du martyr.

Oui l’Eglise est l’Eglise des martyrs et je veux être à son service. L’Eglise de ceux qui vivent les Béatitudes. Ceux qui s’engagent auprès des pauvres, des migrants, des pécheurs… « Pense que tu dois mourir martyr et désire que ce soit aujourd’hui » (Charles de Foucauld).

12/ CURE … MISSIONNAIRE ?

Quand on est jeune, on a besoin d’avoir un projet, de relever des défis : il y en a plein dans l’Eglise. Le plus important n’est pas de vous former à être curé mais de vous former à être missionnaire. Soyez d’abord missionnaire.

Curé, ça s’apprend. Mais être missionnaire ça se désire.

Être curé c’est très bien mais à condition d’être missionnaire. Pour qu’il y ait une paroisse, il faut que le peuple soit composé. Et le prêtre est là pour que le peuple soit missionnaire.

Soyez donc libres et soyez sensibles : capables d’indignation, de compassion et de tendresse.

13/ AVEC d’AUTRES

La France est un pays déchristianisé ? eh bien c’est pour que cela que vous êtes envoyés ! Mais attention vous n’êtes pas tout seul. Rappelez-vous : L’esprit Saint a préparé Corneille avant de lui envoyer Pierre. Soyez de bons missionnaires, mais pas avec vos gros sabots : ni lâches ni orgueilleux. La mission est toujours «missio Deo », préparée par l’esprit Saint. Saint Pierre a les clés mais c’est l’Esprit Saint qui a préparé la serrure !

Vous devez exercer une autorité : elle est là pour faire grandir mais jamais écraser et surtout ne jamais s’exercer seule. L’autorité s’égare dès qu’on pense pouvoir l’exercer sans être aidé. Et rappelez-vous : Le seul prêtre c’et le Christ.

14/ l’HUMUS du PEUPLE de DIEU

Soyez proches du peuple de Dieu : c’est lui l’humus sur lequel a germé votre vocation. Votre vocation n’est pas née par hasard, elle est le fruit de la prière du peuple. Elle a germé sur l’humus du peuple. Vous lui êtes redevable. C’est cela la communion des saints et vous découvrirez un jour à qui vous devez votre vocation : à la prière de cette femme, derrière le pilier d’une église.

Ayez donc pour le peuple un profond respect : il est le corps vivant du Seigneur. Respectez le sensus fidei des fidèles. Vous êtes là pour servir le sacerdoce baptismal, c’est votre vocation.

N’oubliez pas que la relation avec le peuple n’est jamais à sens unique : c’est la foi du peuple qui nourrit votre foi. Vous n’êtes pas au-dessus. Mais comme dit François : au milieu, ou devant, ou derrière. Toujours avec, toujours au service.

Restez donc humbles.

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Le Synode sur la synodalité

Le Service civique dans l'Eglise

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