L’accompagnement au service de la liberté, par Adrien Candiard
Dans le cadre de la 56ème journée mondiale de prière pour les vocations (JMV) qui a lieu le dimanche 12 mai 2019, nous vous proposons quelques extraits de l’intervention du frère Adrien Candiard, dominicain, donnée devant la conférence des religieux et religieuses de France le 13 novembre 2018 à Lourdes.
« Si conversation il doit y avoir, [c’est] accepter de nous laisser transformer : sans cela, parler de dialogue ou de conversation est absolument vain et illusoire et ce qui est en jeu, c’est le cœur même de l’Évangile et de la vie chrétienne, c’est-à-dire la liberté. »
En se laissant guider par l’épître à Philémon, le frère Adrien Candiard, op., offre un chemin pour ajuster la conversation spirituelle, la démarche d’accompagnement. Il souligne d’abord l’attention extrême à avoir quand on s’approche de la conscience de l’autre, un « saint des saints », relevant qu’il n’est jamais évident d’être réellement dans une posture qui aide à grandir en liberté ceux qui s’ouvrent à nous. D’autant plus que les jeunes souvent, sans le savoir, demandent cet abus de conscience, comme désireux « qu’une parole d’autorité leur tombe du ciel non pour les aider à éclairer laborieusement leur conscience, mais pour la remplacer. Or les aider, ce n’est pas se couler dans cette demande, mais au contraire les aider à y poser des limites. » Face à cette tentation, Adrien Candiard, op., en souligne une autre : l’appel de l’urgence, vouloir régler le problème à la place de l’autre, « le mécanisme diabolique par excellence, [le] raccourci. » Pour cela il aborde deux exemples : la vie affective et sexuelle des jeunes, et la distinction à garder entre for externe et for interne. Il termine son exposé en rappelant avec justesse que « La mission de l’Église n’est pas de remplacer l’Esprit dans ce cheminement, mais au contraire de le servir ; la mission des baptisés, c’est d’être les ministres de cette liberté spirituelle – dans ses différentes formes » et que pour cela, « il faut aimer celui avec qui on chemine. Et l’aimer chastement, d’un amour qui ne mette pas la main sur lui. »
Retrouver la conférence du frère Adrien Candiard, op. :
Quelques pistes de réflexions proposées par le père Manuel Grandin, jésuite.
1. Jésus un éducateur hors-norme : en contemplant son agir relationnel, on voit qu’il attire, est séduisant sans être séducteur (il ne se sert pas au passage, laisse la juste distance, laisse l’autre choisir en liberté même si parfois cela le blesse – Juda ou Pierre – ou l’étonne comme avec le centurion). Il trouve aussi les bons lieux et les bonnes attitudes pour vivre la relation, et éviter la relation fusionnelle.
2. Jésus dit les choses : Importance de la correction fraternelle, d’oser dire des choses qui fâchent dans nos structures, entre nous. Avec douceur, mais fermeté. La vérité nous rendra libre. Le mauvais esprit, suggère au contraire, l’entre soi, le secret, l’obscurité.
3. Jésus est le Sauveur (et pas moi). Dans la pratique d’accompagnement, oser reconnaître que j’ai aussi des besoins et des attentes, et aussi des difficultés. Cela permet d’apprécier ces relations, en gardant la bonne distance. De plus, nous ne sommes pas des parents, mais une possibilité de poser un regard autre sur leur vie. Attention à ne pas chercher d’abord à leur plaire (séduction) mais à être soi, en relation avec d’autres (c’est un travail en Église, et je n’en suis qu’un maillon).
4. Être libre et désintéressé. C’est le Christ qui appelle, soutient et conduit. Ce n’est pas à moi de donner la direction, seulement des balises ou des signes que Dieu est à l’œuvre. Sinon un jour un choix, une décision prise sera ressentie comme extérieure et peut conduire à de grands bouleversements dans une vie (divorce, rupture d’engagement etc.)
5. Cinq conseils pour accompagner.
1. Préjugé favorable. D’abord la vie se déploie dans la personne en face de moi, elle est capable de beau, de bien, de bon. Elle est créée à l’image de Dieu.
2. Écouter les jugements qui sont exprimés. Ils cachent souvent une souffrance, sont une manière de nous protéger de nos émotions et cela nous coupe de nos besoins de vie.
3. Reformuler. C’est une manière de donner du poids à la parole, ajuster notre compréhension à ce qui a été exprimé. Bref être sur la même longueur d’ondes.
4. Bien distinguer écoute psychologique et écoute spirituelle. Ce sont deux postures qui ne sont pas à mélanger, même si psy et spi se recoupent souvent.
5. Aider à entre dans l’action de grâce. Souligner et reconnaître que Dieu est à l’œuvre dans nos vies